Une fois n’est pas coutume, la newsletter de Print Ethic donne aujourd’hui la parole à deux entreprises, dans le cadre d’une interview croisée : Graphic Sud, représentée par Romain Dubarry, p.-d.g.et Frédéric Benays, référent RSE ; La Contemporaine Imprimeur, représentée par Alexandre Raud, p.-d.g. et Francine Fonteneau, référente RSE.
Graphic Sud (Sainte-Colombe-en-Bruilhois, 47), seize salariés, imprime en offset et en numérique et propose du routage pour les gros volumes. La Contemporaine Imprimeur (Sainte-Luce-sur-Loire, 44), treize salariés, est spécialisée dans les petites et moyennes séries en offset, numérique et grand format.
Print Ethic : Pourquoi vous êtes vous lancés dans la démarche Print Ethic ?
Romain Dubarry : Ce sont nos clients qui nous ont demandé de formaliser tout ce que nous avions mis en place. Nous avons déménagé en 2021 et nous avons eu la chance de pouvoir construire un nouveau bâtiment, ce qui nous a permis de beaucoup investir dans le bien-être au travail et l’environnement. Aujourd’hui, je travaille avec de grands donneurs d’ordre. Ce n'était pas le cas auparavant car je ne pouvais pas m’aligner sur les prix qu’ils demandaient. Mais ce sont eux qui m’ont expliqué que si je formalisais le résultat de nos efforts, le prix ne serait plus le seul critère de choix. C’est ce qui m’a ouvert les yeux et m’a permis de me lancer dans cette aventure RSE.
Alexandre Raud : Pour La Contemporaine, c’est plutôt une prise de conscience. Un entrepreneur doit être de plus en plus responsable en matière d’environnement, d’écologie…On se rend compte aussi que la manière de travailler évolue. On doit pouvoir mettre les choses à plat, être exemplaire et réussir à transformer nos entreprises pour qu’elles soient plus attractives pour nos clients mais aussi pour nos salariés, nos fournisseurs et nos banquiers. Avec Print Ethic, on a essayé de valoriser ce que nous faisions déjà dans tous les domaines.
Francine Fonteneau : Ce que je trouve intéressant dans la démarche RSE, c’est qu’à chaque décision stratégique, elle nous permet de réfléchir à l’aspect économique, mais aussi à l’aspect social et environnemental et à toutes les parties prenantes. Ce qui débouche forcément sur de meilleures décisions.
Je pense qu’aujourd’hui, pour beaucoup d’acheteurs, ce n’est plus seulement le prix qui compte, et j’espère que cela va perdurer. On a tous besoin de donner davantage de sens à notre travail et la démarche RSE y contribue largement.
P.E. : Où en êtes-vous dans le processus de labellisation ? Et que vous a apporté votre démarche ?
F.F. : Nous étions tous en formation dans le même groupe. Et nos deux entreprises ont validé le premier niveau. La démarche RSE nous a beaucoup enrichis. Il y a les échanges avec les autres imprimeurs, les webinaires, la réunion annuelle…Personnellement, cela m’a permis de sortir de mon travail, d’avoir d’autres ouvertures…Et nous avons pu créer le comité RSE, impliquer tous les salariés et commencer à les sensibiliser aux enjeux environnementaux.
A.R. : Notre démarche RSE nous a permis de structurer notre organisation et notre fonctionnement, de repartir de bases claires sur tous les sujets transversaux. Ce qui est d’autant plus utile pour de petites structures comme les nôtres.
Frédéric Benays : Comme le disait Romain, cela nous a permis de tout formaliser. Avant de nous lancer dans la RSE, nous étions déjà très attentifs au social, à l’environnement… Depuis, nous sommes dans une perpétuelle remise en question et nous nous posons des questions que nous ne nous serions jamais posées auparavant. La quasi-totalité des salariés participe au comité RSE. Tout le monde s’investit, pose des questions, fait des propositions….
R.D. : Pour être labellisé au niveau 1, il fallait obligatoirement traiter deux enjeux, la gouvernance et la formation. Et en choisir un troisième. Nous avons choisi la RGPD* car je savais que nous n’étions pas au point sur ce sujet. Cela nous a obligés à y regarder de plus près et nous avons conclu qu’il fallait prendre rapidement des mesures pour sécuriser l’entreprise, et en particulier les serveurs.
P.E. : Comment avez-vous réussi à impliquer les salariés ?
F.B. : Nous les avons tous réunis pour leur présenter le projet. J’ai pris des exemples concrets, dans le domaine social, par exemple, la question des associations soutenues par l’entreprise. J’ai bien expliqué que si nous nous lancions dans la RSE, c’était tous ensemble, et que la démarche RSE n’incombait pas au seul référent RSE, dans son bureau. Tous les collaborateurs ont été partants, sans doute parce qu’ils étaient déjà sensibilisés aux gestes quotidiens pour l’environnement.
A.R. : Nous avons eu une approche similaire. Nous avions un historique et des fondamentaux déjà solides en matière de RSE. Nous avions besoin de les formaliser et de les valoriser. Nous avons expliqué les enjeux et l’obligation pour l’entreprise de prendre cette direction, notamment vis-à-vis des donneurs d’ordre. Et quasiment tout le monde a adhéré à la démarche.
P.E. : Y-a-t-il eu des réfractaires ?
F.F. : Au début, j’ai eu très peur que personne ne soit intéressé mais, finalement, presque tout le monde est venu. Aujourd’hui, deux ou trois personnes ne participent pas aux réunions mais ce n’est pas parce qu’elles sont opposées à notre démarche. Elles estiment simplement que cela ne fait pas partie de leur mission.
F.B. : On s’est toujours efforcé de faire participer tout le monde. C’est dans la culture de l’entreprise. Quand on a construit notre nouveau bâtiment, tout le monde a exposé son point de vue et mis la main à la pâte. Et nous avons tenu compte des idées de chacun. Il était donc assez naturel que tout le monde s’implique dans la démarche RSE.
Les réunions se tiennent entre 12 h et 14 h, ce qui peut être une contrainte par rapport à notre organisation du travail. Les salariés peuvent aussi avoir des occupations personnelles. Ce qui ne veut pas dire que ceux qui ne participent pas soient opposés à la démarche. En tous cas, quand un sujet concerne une personne qui ne fait pas partie du comité RSE, elle n’hésite pas à venir échanger avec nous.
A.R. : Comme tout le monde participe, il faut éviter que le Comité RSE ne se transforme en CSE** bis et que les débats partent dans toutes les directions, d’où la nécessité de bien les cadrer si on veut parvenir à un résultat.
F.B. : Oui, cadrer les débats est indispensable. A chaque fois, on détermine deux sujets et on essaie de s’y tenir même si parfois, chacun a son avis, ou si quelqu’un part « sur rappelle-toi, la dernière fois… ». Là on essaie de l’arrêter, de dire « on n’a qu'une heure devant nous, il faut être positif ». Si on organise des réunions, c'est pour avancer et pour impliquer les salariés. Si on les fait seulement venir pour discuter, ils finiront par ne plus être intéressés.
Nous n’avons organisé que quatre comités RSE parce qu’on attendait d’avoir de vrais sujets. Alors, vraiment, on avait de la matière, des questions à poser, des améliorations à trouver. Ils étaient peut-être un peu trop espacés mais les salariés comprennent bien cette façon de fonctionner.
A.R. : Donc, j'ai l'impression qu'on se retrouve un peu dans l'organisation. Ces réunions de travail participatives, en fait, existaient déjà depuis longtemps. Seulement, vous les avez rebaptisées « comité RSE ».
F.B. : Oui, exactement. On a toujours voulu impliquer tout le monde. Cela fait partie de notre culture. On n’envisage pas le management sans la participation de tous.
F.F. : J’ajouterais qu’il est facile d’impliquer les salariés quand on parle de leur travail. Sur le social, c’est facile. Sur la sensibilisation et les changements de comportement pour l'environnement, c'est plus difficile.
P.E. : Ils ont quand même tous fait la Fresque du climat ?
F.F. : Oui. Et ils étaient contents.
A.R. : Mais travailler sur de vraies actions pour l’environnement, c’est un peu plus compliqué.
F.F. : Oui, surtout si cela remet en cause l’organisation du travail.
F.B. : Chez nous, ce sont les salariés qui nous poussent, qui ont des idées, qui font des propositions. Et chacun à son avis. On leur a proposé de répondre à un questionnaire et on a eu beaucoup de retours sur la partie consacrée à l’environnement, disant notamment que « nous n’en faisions pas assez ». On a organisé un comité RSE sur les parties prenantes, ce qui n’était peut-être pas le sujet le plus motivant. Mais là encore, cela a bien fonctionné, et les débats ont été animés. Pour l’instant, tout le monde est intéressé et je pense que cela va durer. Cela étant, il y a des sujets que l’on n’aborde pas, comme la RGPD.
A.R. : Là, on est sur un sujet très technique. C’est plutôt une affaire de spécialistes qui se prête plus difficilement au débat.
P.E. : La petite taille de vos entreprises a-t-elle freiné votre démarche RSE ?
F.F. : Dans une petite structure, il est plus facile de peser sur les décisions mais pour la RSE, je ne crois pas que la taille de l’entreprise soit déterminante. Il faut seulement choisir comme référent un salarié qui soit demandeur et surtout ne pas imposer cette mission à qui que ce soit, y compris au DRH. Print Ethic qui structure la démarche fait le reste. Si nous avions dû tout faire seuls, nous n’y serions pas arrivés.
A.R. : En effet, avec Print Ethic, la taille de l’entreprise n’est pas un problème et puis, plus la taille de l’entreprise est modeste, plus la RSE est inscrite dans son ADN.
F.F. : A condition que le dirigeant porte la démarche. S’il le fait, il embarque toute son équipe. Sinon, cela ne fonctionne pas.
F.B. : Pour avoir travaillé dans de grosses structures, je pense que l’on fait plus facilement bouger les choses dans une petite entreprise. Il faut trouver le bon référent. Et il faut que le dirigeant s’implique. S’il y croit, il entraîne tout le monde. On a été surpris par les réactions des salariés : « c’est super ; c’est vraiment une bonne idée ; cela va nous faire progresser ».
A.R. : En tous cas, comme vous tous, je voudrais insister sur la nécessité d’être accompagné et sur la qualité du travail réalisé avec Print Ethic. Cela permet à des petites structures comme les nôtres d’aborder sereinement la RSE et de progresser régulièrement dans la démarche. Je ne vois pas comment nous aurions fait, si nous avions dû partir seuls de la norme ISO 26 000.
*RGPD : Règlement général sur la protection des données
**CSE : Comité social et économique